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La crise de l'Euro est-ce la crise du néolibéralisme?

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Message par Résistons Sam 1 Sep 2012 - 17:59

Notre contributeur Bob Volte a affirmé ici :

Le monde neo libéral n'est pas en crise. Il se porte même très bien.

Il n'y a qu'à voir la situation des pays qui ont été libéraux et ceux qui ne le sont pas aujourd'hui.
La crise de 2008 n'est la faute que des banques et celle des dettes que des États. Le libéralisme n'est pas remis en cause

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Message par Résistons Sam 1 Sep 2012 - 18:58

Pour bien comprendre 2008, il faut remonter un peu dans le temps :

1. Dans les années 60, nos démocraties occidentales semblaient bien plus résistantes qu’auparavant. Elles semblaient vaccinées du nationalisme obscurantiste qui les avait faites trébucher dans les années 30. Le progrès social des trente glorieuses semblait en marquer l’aboutissement. Les sociétés occidentales ne cessaient de s’accroître et la justice sociale progressait.

2. Dans les années 70, le néolibéralisme est un courant politique qui n’est pas totalement nouveau avant son arrivée au pouvoir au tournant des années 80, puisqu’il est le rejeton idéologique des idées libérales du XIX et début du XXème siècle. Le modèle néolibéral apparait sur le plan théorique dès la fin de la guerre et s’oppose dès le départ au compromis fordiste et modèle keynésien défavorable à la bourgeoisie, aux actionnaires, à tous ceux qui pouvaient tirer avantage d’une société moins solidaire laissant libre cours à la compétition des intérêts privés. Une minorité toujours puissante et influente va tenter d’inverser le sens de l’histoire qui avait tourné en sa défaveur dans les années 40 afin de saisir les occasions de restaurer un ordre ancien où la société devant se conformer à ses exigences et/ou ses idées que ce soit d’ailleurs pour des raisons idéologiques ou d’intérêt économique.

La société du Mont-Pèlerin, think thank néolibéral très actif pour promouvoir l’idéologie de marché, est fondée en 1947, entre autre par Friedrich von Hayek et Milton Friedman, philosophe et économiste influent. Les économistes néoclassiques (l’école Autrichienne, l’école de Chicago) vont donner naissance au néolibéralisme théorisé par les courants monétaristes, de l’économie de l’offre, les néo-institutionnalistes et néo-fonctionnalistes à la fin des années 70. Ces théories vont influencer toutes les politiques publiques depuis les années 80 et formeront la bible de la construction européenne.

3. Au début des années 80, l’essoufflement du modèle fordiste, les limites des politiques keynésiennes face à une crise économique suite aux chocs pétroliers, l’étouffement des libertés publiques dans un contexte de guerre froide et de contestations anticoloniales ; ont rendu ce modèle perméable aux critiques déstabilisantes, qu’elles soient libertaires, socialistes ou réactionnaires, remettant en cause le consensus autour du contrat social édicté après la seconde guerre mondiale. Le programme néolibéral va être mis en œuvre de manière méthodique après la victoire politique des personnalités portées par des entourages réactionnaires et influencés par les modèles néolibéraux, M. Thatcher en Grande-Bretagne (1979), R. Reggan aux Etats Unis (1980). La crise économique des années soixante-dix à donc portée au pouvoir des conservateurs et réactionnaires, formant un curieux mélange : leurs programmes politiques étaient basés à la fois sur la volonté de réhabiliter l’autorité conservatrice tout en promouvant la dérégulation économique et les libertés des capitalistes. Fondamentalement, ils se sont construit en réaction aux poussés libertaires des mouvements des droits civiques, des mouvements de mai 68, et posés en protecteur des populations face à la crise économique.

En matière économique, un seul mot d’ordre, mettre fin à la baisse tendanciel du taux de profit, un seul moyen, la dérégulation, une arme, la dette du pays et sa monnaie. Ce programme ne sera pas sans effets: explosion des profits, augmentation des inégalités, appauvrissement d’une large part la société, déconstruction de l’Etat providence, dépérissement et privatisation de celui-ci au service d’une seule classe sociale élitaire, les capitalistes. La France n’échappera pas à ce modèle après la rupture de 1983 et l’échec de la relance isolée des années 1981-1982. Mais elle y résistera mieux que d’autres jusqu’à ce que N. Sarkozy arrive au pouvoir, au moment même où ces thèses seront battues en brèches. L’Angleterre de Tony Blair s’enfoncera dans ce nouveau consensus capitaliste dans les années 1990 tout comme l’Allemagne de Gerhard Schröder au tournant des années 2000 notamment « grâce » aux fameuses lois Hartz, du nom du ministre du travail qui les mit en œuvre.

4. Il faut bien comprendre la nature de ce résultat : la victoire politique d’une nouvelle génération au pouvoir, déterminée à rompre avec tous les compromis de l’après guerre. Ces gouvernants ont alors une idéologie officielle et un projet politique. En substance, une société de marché dans laquelle chacun est responsable de son sort et ne peux compter que sur ses propres capacités pour s’engager dans la libre compétition avec tous les autres membres de la société. La « main invisible » du « marché libre accomplit alors un miracle : quoique chacun poursuive uniquement son intérêt personnel en se fichant pas mal du bien commun, le libre-échange entre tous produit un résultat collectif conforme à l’intérêt général. Néanmoins, il faut maintenir un « Etat minimal » qui assure la défense nationale, la sécurité physique des individus et le respect des contrats et des biens privés. L’initiative privée et la libre concurrence étant réputées toujours plus efficace que la coopération et la solidarité collective, toutes les activités humaines doivent être organisées sur le modèle du marché libre. En plus d’être faux sur le plan théorique, cet habillage intellectuel masque un projet politique et une ambition bien plus triviale : une nouvelle oligarchie s’organise pour abolir la redistribution du pouvoir et des richesses que l’ancienne oligarchie avait dû concéder après la guerre. Ce n’est donc pas l’Etat minimal qui est visé, mais la démocratie minimale. Il s’agit de mettre l’Etat à l’abri des revendications populaires et d’exploiter au contraire sa puissance au service d’intérêts privés. Le pouvoir Sarkosyste a poussé ce système tellement loin qu’il en devenait incroyablement flagrant.

La mise en œuvre de ce projet ouvre un troisième âge du capitalisme : celui de la mondialisation d’un système économique et social dominé par des exigences de rentabilité financière, « le capitalisme financiarisé ». Mais ce projet politique est difficile à mettre en œuvre dans des sociétés qui pendant les trente ans précédent ont construit un modèle social radicalement différent. Pour briser la résistance des peuples, le pouvoir politique néolibéral va employer des méthodes encore en cours aujourd’hui.

5. Les « marchés » vont alors grâce à la dérégulation détenir une arme imparable : la dette. Et ils vont en user et abuser. Par le chantage. Depuis que les Etats ne peuvent plus se financer par le biais de leur banque centrale (1973), ils sont obligés de se financer sur les marchés financiers. Les dettes d’Etats passent donc entièrement dans les mains des acteurs privés. Il faut préciser que la dette est l’origine même de la création des banques et du système capitaliste. C’est la capacité d’obtenir des liquidités supérieures à celles que l’on possède en échange d’un prix à échéance (taux d’intérêt, le prix de l’argent), afin de procéder à des investissements qui nous rapporterons un supplément de revenue à l’avenir, revenu qui est attendu comme supérieur au prix de l’argent emprunté (effet de levier). L’existence même des banques se justifie par la capacité de prêt et d’endettement.

Il est sain que tout acteur économique et étatique soit déficitaire raisonnablement en vue de procéder à des investissements. C’est l’utilisation de la dette qui devrait être discuté, pas le mécanisme de la dette en soi, même pour les Etats. Mieux vaut un Etat endetté et prêt à investir que des acteurs privés endettés a outrance pour satisfaire leurs consommations et la construction de leurs rentes.

6. Les marchés vont utiliser la dette pour justifier les politiques d’ajustement structurel (processus de Washington) dans les pays en voie de développement (par le biais du FMI). Ces politiques ont pour but de mettre en coupe réglé l’économie pour satisfaire à tout prix les spéculateurs et éviter la faillite des Etats afin qu’ils puissent rembourser les acteurs privés, au détriment du bien-être de leurs populations. C’est actuellement la situation en Grèce à qui l’on refuse le défaut de paiement au nom d’une solidarité européenne factice qui coûte à tout le monde beaucoup plus chère, sauf aux banques. Dans les pays développés la dette est aussi utilisée dans cette optique par l’argumentation fausse, et culpabilisatrice à dessein des opinions, d’un report de la dette sur les générations futures, nos enfants. C’est une manipulation, le prix de la dette s’apprécie à l’instant T sur les fondements économiques actuels et ceux qui payent la dette sont les générations d’aujourd’hui, par les taxes et les impôts. Cette situation est d’autant vraie que ce sont les marchés qui fixent le prix, alors même qu’ils sont aveugles à long terme et irrationnels. D’ailleurs, on oublie souvent et intentionnellement de mentionner les actifs que l’on possède pour ne pas les mettre en balance avec la dette que l’on a au bilan. C’est que la dette ne fait pas le poids face aux actifs dans le cas de la France. De plus, ou oublie de mentionner les avantages retirés de la dette passée pour notre génération : économie plus performante ? Meilleurs répartition des richesses ? Meilleure éducation ? Meilleure santé ? Meilleure situation écologique ? Bref, on ne pose jamais les bonnes questions.


Bibliographie :

Néolibéralisme et crise de la dette, par Bernard Teper et Michel Zerbato
Les vraies lois de l’économie par Jacques Généreux
L’oligarchie ça suffit, vive la démocratie par Hervé Kempf
Sur la crise du capitalisme néolibéral par David Kotz
La crise du néolibéralisme par G. Duménil et D. Lévy
Faut-il sortir de la crise par Jacques Sapir
Le néolibéralisme et l’illusion démocratique par Bernard Conte



Bref, avec ces rappels factuels, tu comprends pourquoi je parlais de contre-vérités, bob?
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Message par Résistons Sam 1 Sep 2012 - 19:12

Un documentaire qui date de la fin des années 90, mais qui n'en prend que plus de valeur, tant on voit la détermination des financiers qui avançaient encore à l'aise dans leur plan, notamment Milton Friedman de l'école de Chicago :

En remontant chronologiquement le fil d'une déréglementation, le réalisateur Jean Druon parvient, par petites touches précises, informatives (Thierry Miléo raconte, par exemple, comment les directives européennes ont été surtout rédigées par des cabinets anglo-saxons), à pointer le fonctionnement tautologique de la doctrine libérale: «Si le libéralisme marche, c'est parce que le libéralisme marche.».


PS: si vous ne voyez pas la vidéo, mais un truc du genre iframe, il faut que vous activiez le HTML dans votre profil..
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Message par Bob Volte Sam 1 Sep 2012 - 20:11

Les pays se sont endettés jusqu'à le faire même pour leurs dépenses courantes.
Sans parler des régions qui ont engloutis des sommes colossales pour rien du tout sur le long terme.
La Grèce la faute est au clientélisme et à la corruption notamment de la famille Papandreou.

Les libéraux n'auraient jamais tolérés ça.
Bob Volte
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